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Atelier d'écriture
22 février 2006

Week-en (fin)

. Il prit une profonde respiration, se dirigea vers la plus proche station de taxis, grimpa dans le premier venu. Vers l’est, le ciel s’éclaircissait sans un nuage.

-          Je vais à Newark. Vous croyez qu’on y sera avant huit heures ?

-          Il est sept heures moins le quart, dit le chauffeur avec un fort accent russe. C’est trop de temps.   

Le taxi démarra, tourna à droite dans Joe Dimago puis stoppa, bloqué par un embouteillage.

-          Je  passe par petites rues.

-          Je vous donne trente dollars de plus si on arrive à temps.

-          Ok., Trente

Dans un crissement de pneus, l’homme fit demi-tour, franchit la bande centrale, remonta Joe Dimago, tourna à gauche puis à droite s’engouffra dans une rue étroite jusqu’à la bretelle de New Jersey Turnpike, traversa hudson-river par holland-tunnel.

-          Vous roulez trop vite, vous aller vous faire arrêter par les flics.

-          Arriver dans dix minutes. Ca va ?. Shit ! Pas possible par là. Bouchon. Je passe par park.

L’homme quitta la voie rapide, contourna  Hamilton park, roula sur Jersey avenue, lorsqu’une voiture de police les dépassa, gyrophares allumés et sirènes hurlantes, leur  fit une queue de poisson. Le chauffeur russe pila. Ted fut projeté vers l’avant, se cognat le nez une fois de plus.

-          Vous êtes dangereux mon vieux Vous conduisez comme un dingue !

-          Non comme un moscovite !

Trois policiers surgirent. Le plus jeune dégaina son arme de service, braqua Ted en lui intiment l’ordre de descendre les mains sur la tête puis d’écarter les jambes, enfin entreprit la lecture des droits à une vitesse ahurissante. Ted se retourna, chercha à faire comprendre qu’il n’était que le client. Le jeune policier s’énerva.

-          Ne bougez pas ou je fais feu.

-          Je ne bouge pas, je ne bouge pas répéta Ted les bras en l’air et la peur au ventre.

Quelques curieux observaient la scène avec autant de stupéfaction que d’intérêt. Une seconde voiture de police arriva sur les lieux. Deux policiers en sortirent. Le jeune policier était un stagiaire de l’école de police, montrait un peu trop de zèle face à ces supérieurs visiblement très  embarrassés par ses débordements.

-          Chef, que fait-on maintenant !

-          Maîtrisez-vous mon vieux. Nous ne sommes pas à Dallas ici.

Le jeune policier recula tout en continuant de braquée Ted.

-          Oui chef. Mais ce type c’est bien un enculé de première.

-          Harry ! Ce n’est qu’un client.

Le capitaine s’approcha de lui puis calmement abaissa le bras du jeune homme en prenant mille précautions pour éviter le drame.

-          Rangez cette arme mon petit gars ! Ce ne sont pas les types qu’on recherche.

L’officier de police se retourna vers Ted.

-          Désolé Monsieur. On est un peu nerveux ces dernières semaines. On recherche des drogués qui volent des taxis et qui s’en servent comme bélier pour faire leurs casses. Ils n’hésitent pas à nous tirer dessus. La semaine dernière, un de nos agents s’est fait descendre. Encore toutes nos excuses. Vous pouvez partir Monsieur.

-          Où je peux trouver un taxi dans ce quartier ?

-          Vous avez une station à moins de cinquante mètres d’ici en remontant Montgomery Street.

Ted ne se fit pas prier, empoigna sa sacoche, fit quelques pas jusqu’au carrefour, tourna à droite, se dirigea vers l’unique taxi en stationnement.

-          A l’aéroport de Newark, s’il vous plait !

-          Pas libre ! J’attends une cliente.

-          Une cliente ? Mais je suis pressé. J’ai à peine une demie heure pour prendre mon avion.

-          Désolé M’sieur mais je ne suis pas libre. A moins que la cliente accepte de vous prendre avec elle, alors là moi je m’en contre balance. Pour l’instant vous attendez.

-          Ok , merci dit Ted en ouvrant la portière.

-          Eh, je vous ai dit que vous attendiez mais dehors ! Il faudra d’abord demander à ma cliente si elle accepte.

-          Ok ! ok ! Excusez-moi ! J’attends là. Ça vous va comme ça, dit Ted vexé d’être éconduit ?

-          Ben oui ! Vous avez de ces questions à la con dit le type du taxi en haussant les épaules.

Le jour était bien levé. Un avion passa dans un ciel bleu azuré. Encore une belle journée qui s’annonce se dit Ted. Il était crevé, avait sommeil. Plus que cinq heure pour retrouver Chris….

Une bonne minute s’écoula qui lui parut une éternité. Inquiet, Ted se rapprocha du chauffeur.

-          Vous pensez qu’elle va arriver cette cliente ?

-          J’espère. Si à moins l’quart elle n’est pas là, j’vous embarque.

-          Mais si on attends moins le quart, c’est sûr, je ratte l’avion.

-          Vous prendrez le suivant.

-          Le suivant, vous en avez de bonnes, c’est que…

Ted n’insista pas, le chauffeur retourna à ses mots croisés. Ted patienta appuyé contre un lampadaire.

-«  Si j’appelle Chri maintenant je vais peut-être la réveiller….. Quatre heures de décalage….. Elle devrait faire attention quand elle m’appelle. Elle m’a réveillé plusieurs fois en pleine nuit  pour me parler des malheurs de sa  mère dont je me fout royalement….. J’ai une belle-mère très belle pour ses quarante huit ans mais ce qu’elle peut être chiante et qu’elle allumeuse avec sa manière de me coller ses nichons sous le nez et d’envoyer des œillades à la première paire de couilles qui passe dans la rue… Elle ne se gêne pas pour se balader à poil dans sa maison quand on est là. C’est gênant !…. C’est vrai qu’elle est bien foutu cette conne, conne et chiante avec son mari ! Le pauvre Davitt, il se fait toujours enguirlander pour des riens ….   Chris m’a dit un jour que sa la maladie l’avait rendu impuissant…. Il doit porter des cornes longues la cinquième avenue… Elle a du le tromper un nombre incalculable de fois. D’ailleurs, on n'en parle jamais avec Chris, ça la rend malade de savoir son père dans cet état.  Il commence à sucrer sérieusement les fraises. Il perd la tête.. Le pauvre. Cocu et malade ! Il ne devrait pas faire de vieux os …Ils ont presque trente ans d’écart… Il pourrait facilement  passer pour son grand-père .. Elle est si jeune à peine vingt ans ! Mince !. Je ne voudrais pas qu’on devienne comme eux. Chris ressemble tellement à sa mère parfois…J’ai faim, j’ai très faim et il faut que j’aille pisser… Et puis ils ont voté pour Bush. J’aurai du voter l’année dernière….. Je n’ai jamais voté de ma vie. C’est bête…. Je devrais m’intéresser davantage à la politique…. C’est inouï tout ce que je dois faire en rentrant… »

-          Tenez, la voilà la cliente. Ouahhh Canon la meuf  ! Vous avez vu  ça?

-          Oui, oui !  Vous croyez qu’elle va accepter de me prendre ?

-          Dans son lit ou dans le taxi ? 

Ted ne répondit pas à l’allusion oiseuse, se rembrunit un peu.  La cliente se dirigea droit sur lui.

-          Mettez ma valise dans le coffre,  dit-elle en s’adressant à Ted.

-          Euh, oui ? Bien sûr. Elle pèse une tonne votre valise. Qu’est-ce qu’il y a dedans ?

-          Des livres ! 

-          Des livres, repris Ted ! Pour quoi faire ?

-          Vous êtes bien curieux. Filons, je suis en retard.

-          C’est moi le chauffeur, pas lui, dit le propriétaire du taxi en faisant démarrer son moteur.

-          Oh, pardonnez-moi ! Désolée ! Je pensais que Je suis une idiote. Merci quand même pour la valise.

-          Je.. je voulais vous demander si vous accepteriez de partager la course avec moi ? Je vais à l’aéroport et je suis aussi très en retard.

La femme eut un court instant d’hésitation.

-          Ok ! On partage les frais. ça vous va ?

-          D’accord,  mais c’est moi qui paye la course, répondit-Ted.

Assailli par un excès de galanterie désuète, Ted lui ouvrit la portière. Elle s’en rendit compte, s’en amusa.

-          Y faudrait quand même pas qu’on parte à midi, fit remarque le chauffeur avec  son fort accent d’Atlantic City.

Ted monta à droite du conducteur. Le taxi emprunta la voie rapide A l’arrière, la cliente sortit une cigarette.

-          Désolé m’dame ! J’supporte pas la fumée. Remarquez que ça ne m’empêche pas de tousser dit-il en rigolant de sa mauvaise plaisanterie.

Ted pouvait apercevoir la passagère dans le rétroviseur. Elle se remaquillait, essayait de cacher des cernes. Elle semblait avoir pleuré tant ses yeux étaient rouge. Elle parlait un peu du nez.

-          On y est dans moins de dix minutes. Vous aurez votre avion. 

Le chauffeur se mit à fredonner un air de chez lui. Ted observait la passagère avec insistance, s’interrogeait sur son prénom, la trouvait séduisante. Elle avait un visage aux traits d’une grande régularité. Ses cheveux bruns épais et  noirs de geai accentuaient la blancheur ivoire de sa peau et son petit nez pincé la faisait passer pour une Européenne.

-          A quel terminal allez-vous, dit le chauffeur ?

-          Je prends l’avion de 8h45 ? C’est au terminal C.

-          Moi aussi je prends un avion qui décolle à la même heure. On va peut-être au même endroit, se hasarda-t-il à dire. Je vais à San-Francisco et vous ?

La jeune femme ne répondit pas. Peut-être avait-elle peur de se coltiner l’inconnu durant tout le voyage.

-          J’le sait que c’est au terminal C répondit le chauffeur. Presque tous les matins j’embarque quelqu’un pour San Francisco. Je connais cet avion depuis plus de dix ans que j’fais s’boulot.

Il était presque huit heure quand le taxi s’arrêta. La cliente descendit la première, héla un porteur, alluma une cigarette, se pencha vers eux.

-          Merci pour la course. Je vais…..…

Ted n’entendit pas la fin de la phrase assourdi par les rugissements des réacteurs d’un jet qui décolla au-dessus de leurs têtes . Elle disparut dans la foule.   

-          C’est pas une femme pour vous une nana pareille. Vous avez vu ses jambes. Non, mon vieux. Vous pouvez aller vous astiquer le poireau en pensant seulement à elle. C’est tout ce qu’elle peut vous accorder.

-          Mais enfin, Monsieur. Je ne vous permets pas. Aller vous l’astiquez-vous même votre poireau répondit Ted furieux de se faire insulter par ce rustre.

-          C’était pas méchant c’que j’disais. Les nanas sont sensibles à la gentillesse plus qu’à la beauté ? Vous avez une petite chance avec votre tête de gamin et vos yeux de merlan frit mort d’amour. J’vous ferai remarquer que vous m’devez cinquante-cinq dollars.

-          Quoi ! Cinquante-cinq ! mais vous êtes très cher .

-          Tarif de nuit mon pote.

-          Il faut que j’aille tirer du liquide, Je ne les ai pas sur moi

-          Pas question de me planter là.

-          JE vous dis que je n’ai pas vos cinquante dollars. Je vais en tirer au premier distributeur du coin et je reviens tout de suite. Vous avez ma parole

-          Et vous pensez que votre parole me suffira à vous croire.  On m’la déjà faite celle là. Si vous allongez pas la tune dans les dix secondes j’appelle le poulet d’en face. Il a pas l’air sympa le keuf.

-          Mais Monsieur ! Je ne vais pas vous voler, dit Ted.

-          Des gars qui me disent qui reviennent et qui reviennent jamais, j’pourrai en pondre un par jour. Alors la confiance et la parole je m’en bas les cacahuètes.

Ted perdait patience. Sans trop réfléchir il sortit son PC

-          Tenez, prenez-le en guise de caution. Il vaut  cent fois le prix de la course. Comme cela ça vous va  ?

-          Ok, c’est réglo.

Ted abandonna chauffeur et ordinateur, se dirigea vers le premier distributeur, vexé qu’on ait pu le prendre pour un voleur, tira cent dollars, ressortit du hall puis, inquiet, chercha le taxi mais en vain. L’autre avait filé.

-          C’est dégueulasse. le taxi, mon PC ! 

Par dépit et furieux de s’être fait avoir comme un débutant, Ted jeta un coup de pied dans une vitrine. Immédiatement, une alarme retentit. Le policier de faction accouru.

-          C’est vous qui avez fait cela ?.

-          Non Monsieur l’agent. J’ai seulement , enfin si, mon pied a heurté la vitrine et...

-          Comme ça tout seul. Vous me prenez pour un imbécile ? Présentez une pièce d’identité et votre billet d’embarquement.

Ted fouilla dans ses poches, ne trouva pas sa réservation

-          C’est que …je. J’ai du l’oublié dans le taxi.

-          Alors, vous ne partez pas.

Un grand accablement submergea Ted. Il était incapable de fournir une explication convenable à ce flic qui allait lui faire rater le vol. D’ailleurs, il se sentait si épuisé qu’il avait quelques difficultés à parler.

-          Vous n’avez pas de pièce d’identité, pas de billet et vous vous attaquer au bien public. C’est beaucoup trop Monsieur ! Je vais vous demander de me suivre sans faire d’histoire. Vous irez calmer vos nerfs quelques heures au bureau central le temps de vérifier vos dires.

Résigné, Ted obtempéra sans révolte quand il entendit quelqu’un le héler.   

-          Hé ! Monsieur, j’ai votre billet. Tenez. Je l’ai trouvé sur la banquette arrière et comme nous étions très en retard j’en ai profiter pour vous enregistrer avec moi. Dépéchez-vous, on décolle dans dix minutes. Mais, pourquoi cet agent de police ? Vous avez fait quelque chose de mal ?

Ted avait sa tête des mauvais jours. Il fournit une courte explication.

-          Le taxi est parti avec mon portable et ma sacoche, je n’ai que ma carte bancaire sur moi. Je dois aller au commissariat de police pour tapage sur la voie publique et dégradation de biens d’autrui. Au moins, je pourrai peut-être dormir un peu.

-          Vous connaissez cet homme ? intervint le policier

-          Un peu, oui nous voyageons ensembles, répondit-elle.

-          Vous pouvez le prouver ?

-          Tenez Monsieur l’officier.

-          Oui, c’est correct. Aller, je ne vais pas mettre des battons dans les roues. C’est bon pour aujourd’hui, mais la prochaine fois maîtrisez vos nerfs Monsieur. Vous pouvez me donner le numéro minéralogique de ce taxi ?

-          Je n’ai pas fait attention de toute manière je ne porte pas plainte. Ce n’est pas la peine. On ne le retrouvera jamais. Merci, merci encore. Je, je..

Ted aurait embrassé ce policier pour une fois qu’il tombait sur un type intelligent et compréhensif. C’était peut-être sa chance après tous ces contre-temps.

-          Merci de m’avoir retrouvé. Sans vous je ne partais pas.

-          Dépêchez-vous. On en reparlera plus tard, vite !

Ils coururent vers la porte 26. le guichet était fermé, l’embarquement venait juste de finir.

-          C’est à cause de ce taxi. Quelle poisse !

-          C’est vrai. Quel escroc ce type.

-          Il faut que je prévienne ma femme. Elle va avoir du mal à avaler mes explications.

-          Pourquoi ?

-          Elle est jalouse.

-          De qui, de moi ?

-          Non, elle ne sait pas que …

Ils traversèrent le Hall, vinrent s’assoire à un bar.

-          Je peux vous poser une question ? Quand nous étions dans ce taxi vous n’aviez cessé de me dévisager ?

-          Je ne vous dévisageai pas. Enfin je vous regardais, c’est vrai.

-          Vous me regardiez seulement ?

-          Et bien, oui.  Ce n’est pas interdit. C’est parce que je,….  je vous trouvais belle, voilà,  lâcha-t-il par dépit.

-          Pour quelqu’un de timide vous êtes plutôt franc.

-          Désolé, je n’aurai jamais du vous dire cela.

-          Il n’y a pas vraiment d’offense. C’est même agréable.

Puis changeant de conversation,

-          Vous avez la tête d’un type qui a fait la noce toute la nuit.

-          C’est pas exactement de noce qu’il s’agit, mais ce serait un peu long à vous expliquer.

-          Nous avons le temps. Nous avons deux heures à perdre ! Et puis ça me changera les idées. J’ai le moral à zéro.

-          A cause de l’avion manqué ?

-          Non ! La journée d’hier a été pénible, répondit Mélissa les yeux pleins de larmes.

-          Désolé, je ne voulais pas vous ennuyer. Cela ne me regarde pas. On se connaît si peu !

-          On ne se connaissait pas avant de nous rencontrer.

Ted trouva la remarque aussi redoutable qu’ambiguë. Il lui répondit par un sourire timide Mélissa le lui rendit magnifiquement. Discrètement mais sûrement elle gagnait le cœur de Ted. 

-          Vous avez une blessure sur le nez.

-          Ce n’est rien.

-          Donc, si j’ai bien compris, vous étiez complètement saoul hier soir et en sortant du bar  vous avez voulu embrasser un réverbère sans lui demander son avis. Vous l’avez certainement offenser ?

-          C’est vrai, on ne peut pas plaire à tout le monde, même à l’éclairage public !

Répliqua Ted en s’amusant de la tournure que prenait leur conversation.  Du même coup l’atmosphère se détendit puis suivie par un silence presque gênant qui  s’installait entre eux. La  situation embarrassa Ted qui chercha à combler au plus vite le silence.

-          Euh ! Il va falloir que j’appelle ma femme.

-          C’est trop tôt. Vous allez la réveiller Il n’est pas cinq heures là-bas.

-          Ah , oui, où ai-je la tête ? La blessure ! Il faut que je vous raconte la nuit que j’ai passée.

-          N’omettez aucun détail, aussi croustillant soit-il.

-          Vous allez être déçue. Hier soir, en quittant la boite, je me suis retrouvé coincé dans un escalier de service désaffecté. J’étais enfermé sans comprendre comment ça à pu m’arriver. J’ai bien essayé d’en sortir mais toutes les portes étaient verrouillées. J’ai descendu puis remonter les cent-quinze étages de la tour. J’étais épuisé et je me suis endormi assis sur une marche.   

-          Vous devez être épuisé !

-          Un peu. C’est un vigile qui m’a réveillé. Il m’a pris pour un voleur ou je ne sais quoi. Je ne comprenais pas ce qu’il voulait et puis il m’a frappé, comme ça pour rien. Quel pauvre type. Mais pourquoi je vous raconte ça. Cela n’a aucun  intérêt.

-          C’est vous qui le dites. Et bien sûr vous lui avez répondu en lui flanquant votre poing dans la figure.

-          Non  ! Non, Je ne suis pas du genre à me battre. J’avais peur de ses réactions. Il me braquait avec un flingue.

En racontant ses mésaventures, Ted se sentit comme happé par le charme que dégageait cette femme et face à cela il ne pouvait pas lutter. Quand à Mélissa, elle lisait à livre ouvert dans les pensées de Ted. Elle en ressentit un réel plaisir et une certaine satisfaction. Plaire à un homme au lendemain d’une tragédie conjugale et sentimentale lui était d’un grand réconfort. Mélissa usa de ses charmes, ce qui précipita Ted dans les affres cornéliennes d’une relation extraconjugale dont il n’était pas maître et qui, de minute en minute, se faisait plus précise.

-          Le garçon aura oubliés nos cafés dit évasivement Mélissa !

-          Oui, il les a oubliés, rétorqua banalement Ted. Je vais le rappeler.

Quand un appel retentit dans l’aérogare invitant les derniers passagers du vol UA93 à se présenter au guichet 23 ».

-          Ils réouvrent ! Laissons tomber les cafés, venez vite, on a peut-être une chance d’embarquer s’écria Mélissa.

Elle le prit par la main, coururent vers le guichet 23, présentèrent leur billets d’embarquement, réussirent à passer. Dans le couloir qui menait à l’avion, Mélissa se rapprocha de Ted pour lui donner le bras. Ted tressaillit davantage, passa ses doigts sur ses joues rappeuses pour ce redonner une contenance.

-          Chenail ! Ce n’est pas un nom américain. Qu’elle sont vos origines ?

-          Française.

-          Et vous parlez français lui demanda Melissa en très bon français ?

-          Couci-couça. Répondit Ted avec l’accent yankee. J’en ai fait quatre ans au collège.

-          Et vous avez tout oublié. Êtes-vous déjà aller en France ?

-          Oui, répondit-il embarrassé.

-          Et où êtes-vous allé ?

Ted n’avait jamais mis les pieds en Europe, ne répondit pas à la question très embarrassé par son stupide mensonge.

-          Nous serons assis l’un à côté de l’autre dans l’avion. Je suis heureuse de vous avoir rencontrée et j’ai très faim. Pas vous ? On parlera de la France . C’est un petit pays mais c’est si «  charmant »

-          Oui.

-          Vous êtes un garçon curieux. Vous m’avez fait le plus beau compliment qu’une femme peut espérer entendre et vous restez là timide comme un collégien, campé sur votre réserve. Pourtant, on dit que vous êtes tous d’horribles dragueurs à New York. Vous ne m’avez pas même demandé mon prénom. Vous ne voulez pas savoir comment le m’appelle ?

-          Si, bien sûr, dit Ted le cœur dans un état de décomposition avancée.

-          Melissa Clauss. J’ai quarante ans. Je rentre chez moi à San-Francisco. Je suis brodeuse dans une maison de couture et je ne suis plus mariée depuis hier après-midi, d’où ce voyage. Mon ex-mari habite New-York, travail au World Trade Center comme vous. C’est un vrai salaud. Je vous ai rencontré ce matin. Il me semble que le goût de vivre revient grâce à vous.

Transformer en chamallow ramolli au barbecue, Ted sentit ses jambes l’abandonner. Ils embarquèrent les derniers.

Le vol UA93 s’écrasa en Pennsylvanie à 10h03, tuant 44 personnes et les membres d’équipage après que certains passagers se sont battus avec les pirates de l’air. Ted ne compris pas la revendication de ces hommes armés seulement de cutter et de petits de scout. Les pirates les avaient cantonnés au fond de l’appareil. Ted protégea Mélissa jusqu’au dernier instant. Une effroyable explosion désintégra l’appareil. 

América était arrivée vers sept heures prendre son service. La société qui l’embauchait lui avait préparé sa lettre de licenciement. Le revoie immédiat pour motif d’insuffisances professionnelles. Humiliée, vexée, en pleure, América rentra chez elle par le train de huit heures, furieuse d’avoir perdu son job et très contrariée par la poisse qui ne la quittait pas depuis son arrivée au New Jersey. A neuf heures quarante cinq, le premier avion de ligne percuta la tour nord entre le quatre-vingt-dixième et le centième étage. Ce matin là Charles Burger était arrivé de très bon heure. Une heure trente après, Charles sortait du WTC contusionné et très choqué. Il eut à peine le temps nécessaire pour échapper à la mort. Actuellement il souffre de bronchite chronique et de cauchemars récurrents qui le réveillent chaque nuit. Chris a accouché prématurément d’un petit garçon qui se porte bien aujourd’hui. Il porte le nom de son père.   

FIN

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